POUR LES GRECS ANCIENS, LE BARBARES EST CELUI QUI NE SAIT PAS PARLER LE GREC. LE TERME A SERVI A QUALIFIER TOUS LES ETRANGERS A LA CIVILISATION GRECQUE, PUIS A LA CIVILISATION ROMAINE
L'Empire romain a, depuis ses origines mêmes, été confronté à la menace barbare : des la fin du 2e siècle av. J.-C, les CIMBRES et les TEUTONS étaient venus de leur lointain JUTLAND (péninsule du Danemark) semer la panique dans les provinces de la Méditerranée occidentale que ROME venait tout juste de soumettre. C'est contre cette menace qu'aux 1er et 2e siècles, les frontières de l'empire ont été armées, et constituées en un limes fortifié depuis les bouches du Rhin (sans parler du lointain mur d'HADRIEN face aux PIETES d'Ecosse) jusqu'aux bouches du Danube.
L'attraction exercée par les richesses de l'économie et de la civilisation romaines sur les populations d'outre-Rhin et d'outre-Danube les ont parfois jetées en des raids fulgurants et dévastateurs; tel en 167, le roi des Marcomans BALLOMAR traversant le Danube, les Alpes et atteignant AQUILEE, ville de Vénétie orientale. MARC AURELE est mort treize ans plus tard sur le front danubien, en s'épuisant à colmater les brèches.
Des confédérations se formerent dans le courant des 2e et 3e siècles :
les SAXONS(« porteurs de couteau ») des côtes de la mer du Nord ;
les FRANCS (les « libres ») de la rive droite du Rhin ;
les ALAMANS (« tous les hommes ») d'entre haut Rhin et haut Danube.
D'importants mouvements migratoires avaient, dès le 2e siècle, commencé d'amener des peuples depuis les contrées des mers du Nord jusqu'aux frontières de l'empire :
les BURGONDES, de Poméranie (sur la Baltique) jusqu'en Souabe-Franconie (au Sud-Ouest de l'Allemagne) ;
les VANDALES, du Danemark jusqu'à la vallée de l'Oder et au Danube moyen ;
les GOTHS, du Sud Scandinave et de la basse Vistule jusqu'aux rives de la mer Noire et au delta du Danube.
Vers 250, la pression redoubla aux frontières de l'empire :
raids des pirates FRANCS, FRISONS et SAXONS sur les côtes britanniques et gauloises de la mer du Nord et de la Manche,
premières agressions des SCOTS d'Irlande et les PIETES d'Ecosse sur l'Ouest et le Nord-Est britanniques ;
attaque frontale des FRANCS et début de leur infiltration silencieuse dans l'extrémité nord de la Gaule ;
tentatives de percée des ALAMANS sur la Gaule du Sud-Est et l'Italie du Nord ;
pression des GOTHS sur la basse vallée du Danube et même, après qu'ils eurent franchi le Bosphore, sur l'Asie Mineure.
L'Empire eut du mal à réagir.
AURELIEN (270-275) réussit cependant à colmater quelques brèches et mit en place la défense des cités - construction d'une enceinte autour de Rome.
Surtout, les réformes administratives et militaires de DIOCLETIEN (284-305) et de CONSTANTIN (306-337) lui assurèrent un durable répit.
Parmi ces réformes, il faut souligner le partage de la dignité impériale, sous Dioclétien, entre deux Augustes - l'un maître de l'Orient, l'autre de l'Occident - et deux Césars délégués, ainsi que le glissement corrélatif des centres de décision au plus près des frontières (TRËVES, située tout près du limes rhénan, et SIRMIUM, proche du limes danubien, furent ainsi promues capitales), tandis que les défenses frontalières étaient renforcées par l'appel aux Barbares eux-mêmes.
Ceux-ci contribuèrent nombreux à la remise en ordre du IVe siècle.
Certains Barbares d'ailleurs graviraient bientôt tous les degrés de la carrière militaire,
devenant, à la fin du 4e ou dans le courant du 5e siècle, maîtres de la milice, voire conseillers rapprochés des empereurs,
comme le Franc ARBOGASTH et le Vandale STILICON, tous deux au service de l'empereur THEODOSE (379-395),
ou le Suève RICIMER chef de l'armée romaine d'Italie du Nord, qui, entre 456 et 472, se trouva en mesure de faire et défaire les empereurs, en particulier MAJORIEN (457-461), SEVERE (461-465) et OLYBRIUS (472).
La deuxième moitié du 4e siècle vit l'irruption en Europe des peuples des steppes
- iraniens comme les ALAINS, ou turco-mongols comme les HUNS.
Ils amenerent avec eux leur culture comme cet « art des steppes » (orfèvrerie cloisonnée et polychrome au décor zoomorphique) qu'ils transmirent à leurs voisins germaniques ;
ils déstabilisèrent aussi, par la fulgurance de leurs attaques et par une installation durable sur la rive gauche du Danube moyen (à partir du 5e siècle), la géographie des peuples qui était en train de se mettre en place en Europe centrale et orientale.
L'avancée des Huns fut la déroute des GOTHS de la mer Noire. Si les OSTROGOTHS (« Goths de l'Est »), se soumirent un temps à l'« Empire hunnique », les WISIGOTHS (« Goths de l'Ouest »), demandèrent et obtinrent en 376 de l'empereur d'Orient VALENS le droit de venir s'abriter dans l'empire.
Mais il fallut leur victoire sur l'armée impériale à ANDRINOPLE en 378 - où l'empereur VALENS trouva la mort - pour qu'un véritable statut leur fût reconnu : le foedus .
en 382, le nouvel empereur d'Orient THEODOSE leur accorda des terres en Mésie (sur la rive droite du bas Danube) et des revenus du fisc.
Cependant, quoique restant tout à fait autonomes, sous la houlette de leur chef FRITIGERN, ils devraient désormais mettre leur force armée au service des empereurs.
Les WISIGOTHS furent les premiers à introduire l'arianisme en Occident, quand leur chef ALARIC, rompant le foedus, partit s'établir avec son peuple d'abord en Illyrie, dans la partie septentrionale des Balkans (397), puis en Italie (401).
Là, n'obtenant pas la totalité du tribut qu'il avait exigé de l'empereur HONORIUS, fils de THEODOSE, installé à Ravenne, il fondit sur ROME en 410 et fit mettre, trois jours durant, la Ville à sac par ses guerriers.
Son successeur ATHAULF qui, changeant de cap, acheva de conduire la migration de son peuple jusqu'en GAULE: il s'installa à TOULOUSE en 413, épousa GALLA PLACODOA en 414, et, dès l'année suivante, décida de poursuivre l'aventure en direction de l'Espagne.
Alors seulement, en 418, ROME se décida à conclure avec les GOTHS un nouveau foedus, qui leur reconnaissait des terres et des revenus dans la moyenne vallée de la Garonne, à charge pour eux de défendre les côtes atlantiques contre les pirates SAXONS,
et surtout d'écraser les « bagaudes », soulèvements de paysans déclassés qui se multipliaient dans l'Ouest de la Gaule.
Les Wisigoths contrôlerent un ensemble de territoires considérable, peu à peu dilaté de la Loire aux Colonnes d'Hercule, l'actuel détroit de Gibraltar.
Le 31 décembre 406, une masse énorme de VANDALES, de SUEVES et d'ALAINS, poussée en avant, par la pression des HUNS, avait franchi le Rhin gelé et entrepris une longue errance à travers la Gaule.
Les armées romaines, bientôt renforcées par les troupes rappelées de (Grande-)Bretagne, n'avaient pu les refouler, ni les empêcher de franchir les Pyrénées (vers 409-410) et de s'installer en Espagne.
La percée de 406 fut le prélude à une véritable déferlante, submergeant un empire qui avait montré les limites de sa résistance.
D'abord les BURGONDES qui, dans la foulée immédiate des Vandales, des Suèves et des Alains, s'installèrent un temps sur la rive gauche du Rhin. En 443 un foedus les fixa en SAPAUDIA, c'est-à-dire dans la moyenne vallée du Rhône, entre Genève et Lyon, d'où leur royauté étendit peu à peu son influence sur une bonne part de la Gaule du Sud-Est, depuis le DIOIS jusqu'au plateau de Langres.
Les ALAMANS, d'abord installés dans les « champs Décumates », prirent quant à eux de fermes positions en Alsace et dans le Palatinat.